Pourquoi chercher midi à quatorze heures ? Alors que tout est là, ici à notre porte. Ce petit sentier jalonné de milliers de fleurs, comme autant de bornes colorées et odorantes, il faut le parcourir et les respirer à plein poumons. Ou alors ce vieux couple d'agriculteurs qui nous saluent, attablés dans la cour dès sept heures du matin. Ils commencent leur journée avec un bout de tomme du Trieves et un caluchon de blanc de Savoie, heureux de ce jour qui se lève, encore et encore. N'est-ce pas vivre que de marcher ainsi dans une nature apaisée ? Ici l'entrée d'un champ baigné de lumière, là le bourdonnement incessant des abeilles travailleuses autour de leur ruche.
Bientôt la forêt s'estompe pour laisser place à de riantes prairies, l'herbe est maintenant épaisse comme un moelleux tapis de verdure, si les crocus et l'herbe rase ont disparu, ils ont laissé la place à des myriades d'autres fleurs, aux parfums capiteux, comme le Lys Martagon ou des Orchidées sauvages et entêtantes. Au loin les sommets du Vercors s'allument sous l'arrivée du soleil déjà incandescent, au-dessus de nous chantent les alouettes et les rapaces, brisant le silence qui nous entoure. Bref, on est bien, et quand en plus une douce brise arrive face au plus beau décollage partant d'un sommet, on est au paradis. Préparation de la voile sur un lit de boutons d'or, eux-mêmes posés sur une moquette de thym violet d'où s'échappent des arômes parfumés, comme ceux du rôti de porc que faisait mijoter ma maman !
Le retour par les airs est la cerise sur le gâteau, ouvrant pour nous la troisième dimension. Un vol tranquille par dessus les oiseaux qui gazouillaient tout à l'heure sur nos têtes.
Si le décollage a été une formalité, l'atterrissage s'est moins bien passé, la faute à la forme du seul pré fauché, un terrain triangulaire en pente, les deux côtés supérieurs étant bordés d'une haute haie d'arbres centenaires.... La conjonction de la géométrie du pré et de la brise montante n'a pas été favorable à la prise de terrain, me voici arrivant vent de cul plein badin comme un poisson dans sa nasse, au dernier moment, il a fallu opérer un brutal changement de direction sous peine de finir dans les arbres qui bloquent le haut du champ, autant dire que mon fessier en porte encore les stigmates, n'est pas Chrigel Maurer qui veut !
Mais c'est pas grave, la montagne on y aime quand même !