Danger sur le tour des Combins

olivier lochard
25-09-2016 12:07:08

eh oui.... Il y a des itineraires , et même des randonnées , à proscrire en début de saison , sauf peut-être pour des individus très expérimentés et bien équipés ! Paradoxalement , ce sont les itinéraires les plus pentus qui sont peut-être les moins dangereux , parce qu'on a conscience qu'il faut utiliser tout son matériel de haute montagne.... d'ailleurs , les faces nord se font , en alpinisme , préférentiellement en juin , quelquefois en juillet , quand il y a encore suffisamment de neige ; alors qu'en aout et en septembre , ces faces sont en glace vive ! :!:

Benjamin Dollet
24-09-2016 18:01:41

Bonjour à tous, Le tour des Combins est une très belle randonnée en boucle en six jours en Suisse et en Italie. Il n'est pas réputé dangereux, aucun de ses passages n'étant réputés exposé. De plus, une passerelle traverse depuis 2014 le glacier de Panossière, ce qui facilité la traversée entre le Cabane Brunet et le refuge de Panossière (ou François-Xavier Bagnoud, du nom du pilote suisse d'hélicoptère suisse qui s'est tué au Dakar avec Balavoine en 1986, pour la petite histoire...). Cette réputation est trompeuse en début de saison pour l'étape Panossière-Chanrion, et comme il m'est arrivé une "petite" mésaventure, je me permets de la partager pour attirer l'attention des randonneurs qui voudraient faire cette étape par la traversée haut au-dessus du lac de Mauvoisin en versant ouest, par la Pierre à Vire et la Tsessette. Il est à signaler que cette étape peut aussi se faire versant est par le col de Tsofeiret, ou même par la longue et fastidieuse piste qui longe le lac par l'ouest. Nous sommes le 12 juillet 2016. Le printemps a été particulièrement humide en Suisse romande jusqu'au 20 juin, et la saison n'est pas très avancée. Je m'engage, seul, dans l'étape Panossière-Chanrion, qui promet d'être magnifique. La vue sur le Grand Combin au petit matin, en montant vers le col des Otanes, est de toute beauté. La descente versant nord de ce col, situé à 2845 m d'altitude, est complètement enneigée jusque vers 2600 m ; ce coin garde sans doute la neige encore tard en saison. Même si cette descente n'est pas exposée, elle peut déjà impressionner le randonneur peu habitué aux névés, car il y a quelques passages en descente assez raides. C'est d'ailleurs un bon test : s'il reste pas mal de neige et que certains n'y sont pas à l'aise, la suite par Pierre à Vire et la Tsessette est à proscrire, mieux vaut prendre Tsofeiret ou la piste (voir ci-dessus). Je me fais dépasser dans la descente par François, un très sympathique randonneur suisse, seul lui aussi. Une bonne descente jusqu'à Pazagnou, une courte mais raide remontée à la Pierre à Vire fraîchement déneigée, une redescente dans les alpages et on entame une très longue traversée franchement ascendante vers le pied du glacier de la Tsessette. Cette traversée remonte le versant herbeux du côté ouest du lac de Mauvoisin, passant en haut des falaises. Je m'engage dans cette traversée, et je rencontre un premier névé pile sur une des drayes qui drainent l'eau de fonte des névés/glaciers situés plus hauts. C'est un pont de neige qui a l'air bien fragile... Premier pas dessus, je tape bien fort du pied, et il s'éclate dans le torrent juste deux mètres devant. Pas de problème pour traverser, mais c'est un premier avertissement sur les dangers de ce passage en conditions de début de saison. J'arrive ensuite au point culminant de la traversée, vers 2580 m. C'est également le passage le plus étroit entre les falaises. Un névé assez raide le barre, mais avec de bonnes traces en traversée ascendante, je m'engage donc "en toute confiance" avec ma paire de bâtons pour tout artifice (j'avais pris la paire de crampons dans le sac au cas où). Ce névé est court, mais il surplombe une mince banquette herbeuse fraîchement déneigée, 10 mètres de large tout au plus, avant le grand plongeon dans les falaises. Problème, au moment de finir le névé, je viens buter sur un mur vertical de neige de deux bons mètres à redescendre ! Plus de traces. Je n'ai pas de piolet, je dois renoncer à désescalader ce mur de neige, court, mais exposé. Problème, il faut maintenant redescendre ce névé raide en traversée descendante. Bêtement, je ne pense pas à mettre les crampons. Le temps de traverser très prudemment la moitié du névé, à assurer les pas et à me dire que c'est bien péteux, je glisse du pied aval, je pars dans le névé en glissade incontrôlable, j'atterris dans la banquette herbeuse en contrebas où je m'arrête en me râpant les bras et les jambes (j'étais en manches courtes...), à 3-4 mètres au-dessus du grand plongeon. Je suis indemne, c'est l'essentiel. J'ai laissé sur le névé mon bâton amont, qui est resté planté bien droit au milieu du névé. Je renonce à aller le chercher, en pensant que les suivants, en voyant ce bâton seul et les traces de glissade en-dessous, devront sans doute bien flipper... Je continue en contournant prudemment le névé par en-dessous, dans la banquette herbeuse inclinée et déversante au-dessus des falaises. Je m'en suis bien tiré ! La suite des événements (un autre pont de neige en fin de vie, mais qui tenait encore à la traversée, les planches en bois explosées sur les torrents du glacier de la Tsessette, l'orage en montant à Chanrion) ne sont que des péripéties, mais l'ensemble rappelle les dangers objectifs de la montagne de début de saison, quand la neige rend un passage anodin très dangereux. Pour l'anecdote, plusieurs incidents/accidents semblent s'être produits ici. Je recroise François, le randonneur suisse, le soir à Chanrion, et je lui demande comment il a passé ce névé. C'était en fait le premier de la saison, comme moi il a buté sur le mur de neige, et il est parvenu à redescendre sans dommage en assurant à fond chacun de ses pas, faisant ce que j'ai pris comme une trace déjà bien tassée par plusieurs passages de randonneurs... Lui aussi a trouvé le passage dangereux. Le lendemain, en redescendant à Mauvoisin, nous croisons un groupe de 5 belges, 2 adultes et 3 enfants, que j'avais déjà vus plus tôt dans la même traversée. Eux aussi sont passés par là, plus tard dans la journée, ils ont été effrayés par le bâton sur le névé et ont galéré à l'éviter par le haut, en bordure des falaises supérieures, ont explosé le pont de neige que j'aurai été le dernier à traverser cette saison, se sont tapés l'orage sur toute la traversée et ont dû se retirer, tardivement, à Mauvoisin... Au-delà de l'anecdote et de mon expérience personnelle, évitez donc ce passage sur le tour des Combins "en début de saison", je dirais jusqu'à mi-juillet. Il est impératif que ce passage soit entièrement déneigé. Renseignez-vous sur l'état d'enneigement à Panossière ou à Chanrion si vous faites le tour en sens anti-horaire (depuis Chanrion, on voit bien toute la traversée, et donc son enneigement résiduel éventuel). En cas de doute, passez par Tsofeiret (moins exposé, d'après François qui est redescendu par là) ou par le bord du lac.


 

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