Pointe du Mont du Fût ou Bellachat par l'arête Est depuis La Sauce

Voila une vallée dans laquelle je n'ai jamais trainé les grolles, et encore moins la voile. Le temps calme annoncé est un excellent prétexte pour aller y faire un tour. Seulement pas le moindre topo sur ce versant du sommet, rien, que dalle ni sur Biv ni ailleurs. La jolie arête Est est attirante alors allons y.

La première partie pour atteindre les alpages est un peu monotone sur la large piste. À peine ai-je dépassé la ferme de la Combe que démarre un 4X4 en partance pour les alpages où je dois passer. Quand le véhicule arrive à ma hauteur je lève le pouce, la bergère au volant me fait un large sourire, répond à mon salut et continue benoitement sa route.... je ne peux certes pas reprocher à cette jouvencelle sa prudence à embarquer dans son véhicule un inconnu lourdement chargé - qui plus est loin de toute habitation - cependant je me voyais déjà m’économiser la longue et plate piste... Finalement en coupant les épingles cela monte assez vite.

Plus haut je croise l’énorme troupeau de vaches laitières dans un concert de sonnailles impressionnant. Peu à peu l'espace s'ouvre et me voilà sur la longue arête des Monts du Fut. Je laisse l'itinéraire entretenu par la commune avant de poursuivre la progression toujours à cheval sur cette croupe maintenant assez aérienne. C'est en arrivant en haut de la voie d'escalade du versant opposé que j'ai pris peur, mais elle est vraiment effilée cette arête ! Mais finalement en rusant par deux fois, en descendant dans la pente d'herbe raide, je shunte les deux passages inquiétants.

Et puis les formes s’adoucissent, il ne reste plus qu'à suivre la croupe débonnaire. Le vent vient toujours des flancs ensoleillés, pourvu que cela dure car le meilleur décollage est de loin le Sud-Est. Bingo, j'arrive à la croix sur une prairie incroyablement belle à cette altitude, parfaitement orientée au vent qui souffle cycliquement au gré des thermiques qui passent. Il est onze heures et l'activité thermique semble déjà puissante. Après un tour d'horizon rapide - il faut dire que de larges cumulus commencent à bourgeonner sévèrement tout autour – je déplie la voile sur ce décollage de rêve. Il ne reste plus qu'à attendre le prochain wagon et décoller presque sur place.

Les vautours m'indiquent le gros thermique, il est à l'aplomb de l’arête blanche, large et puissant. Il me remonte illico presto au nuage dont la base est à 2900. Compte tenu de l'heure somme toute matinale et de l'immense solitude qui règne ici, je ne m’éternise pas bien que l'air soit étrangement calme, la suite du vol est tranquille. Je me bénis d'avoir posé deux flammes à la Sauce car l'aérologie en bas me semble vraiment étonnante, au parking sous le village, le vent remonte bien la vallée, à la Sauce il est perpendiculaire ?!? La fourche des deux vallons doit y être pour quelque chose. Je me prépare à un atterrissage brutal, mais contre toute attente, il est d'une douceur idéale, décidément ce vol sera une réussite de bout en bout.

Je ne sais pas si c'est l'écoute ce matin de la Création de Haydn, mais j'ai trouvé la nature étonnamment belle, ou alors serait-ce la proximité immédiate de l'automne, matérialisé par des sureaux déjà lourdement chargés de fruits, je ne sais pas mais c'est bon de se promener en montagne !