Sortie : Tuer le temps ou vivre l’instant ?

Un cadran solaire dans la vallée de la Séveraisse, non loin du Chapeau

Données de la sortie

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  • Date :
  • Dénivelé :
  • Temps de vol :
  • Plafond max :
  • 06-10-2019
  • 1300 m
  • 20' m
  • 2400 m

L’avantage de mal dormir c’est que le réveil devient un accessoire inutile, c’est à 4h du matin que j’émerge, et plus moyen de se rendormir. Alors plutôt que de ressasser des problèmes existentiels sans réponse, à 5h c’est le branle-bas de combat, direction La Chapelle en Valgaudemar, dans la profonde vallée de la Séveraisse qui pénètre au cœur même de l’âpre massif des Ecrins. J’arrive à pied d’œuvre au lever du jour. Un berger sympathique m’accompagne au début du sentier afin de me préserver des patous qui surveillent le troupeau endormi, ils sont sur le départ et attendent le camion de la transhumance, la fin de la saison est là.

Question temps ce n’est pas terrible, une couverture de nuages ☁️ recouvre entièrement la vallée telle une chape de plomb dans une ambiance plutôt glauque. Pourtant après une bonne heure de marche, me voilà soudain à percer ce brouillard humide pour brutalement me retrouver sous un soleil ☀️ éblouissant ! Ce changement de décor est proprement hallucinant ! Si la mort hantait les ombres de la vallée, la lumière éclatante communique au pèlerin d’un sentiment de pleine existence. Marcher dans un semblable décor devient un hymne à la vie, la joie de vivre remplit mes poumons et je me surprends même à rire aux éclats de me retrouver seul au milieu de ce paysage féerique. Comme une apparition mystérieuse, un magnifique spectre de Broken se dessine sur les brumes en contrebas.

Pourtant le suspens est encore entier... Cette mer de nuages que je domine maintenant est une barrière infranchissable avec un parapente, il s’agirait qu’elle se fragmente encore une fois pour me céder le passage. Mais peu importe, le sommet est un passage obligé, il est encore loin et le sentier bien incertain. Les rafales glaciales au débouché du brouillard s’estompent pour laisser planer maintenant une sérénité bienveillante. C’est au sommet que je me suis mis la rate au court-bouillon, en effet, la dissolution du brouillard est en cours ! Mais une couverture de haute altitude risque d’occulter les rayons solaires indispensables au changement d’état de l’eau en suspension plus bas, la marée blanche pourrait se refermer définitivement.

Dans ma précipitation, je n’étale pas la voile dans la bonne direction et foire lamentablement un décollage malgré les thermiques qui balayent le dôme herbu. Le palpitant est dans le rouge, il est temps de faire descendre la pression, alors tranquillement j’observe plus sérieusement les conditions avant de remettre la voile en place dans une nouvelle orientation. Le décollage est impeccable, il ne me reste plus qu’à me diriger vers le trou béant où se dessine maintenant le charmant village de La Chapelle en Valgaudemar, 1500 mètres sous mes pieds. C’est avec un plaisir consommé que j’atterris quelques minutes plus tard tout au fond de la vallée, hilare de cette réussite à laquelle je ne croyais plus.

L’atterrissage ayant eu lieu plus bas dans la vallée, il me faut remonter en stop. Je tente une nouvelle technique, elle consiste à ne pas plier la voile et la laisser ostensiblement traîner à mes pieds tout en levant le pouce benoîtement. Le succès est immédiat ! Un bus rempli de retraités en vadrouille s’arrête devant moi, la grosse porte s’ouvre dans un vrombissement électrique pendant que le chauffeur m’invite à monter avec tout mon bordel. Me voilà subitement la star du bus, au centre de tous les regards, assailli de questions diverses et variées auxquelles je m’applique à répondre le plus doctement possible. Plus loin je descends du bus sous les applaudissements nourris d’un public conquis à ma cause. 

 

C’est en passant devant un splendide cadran solaire que l’aphorisme suggérée au dessus du gnomon ne laisse plus planer aucun doute : il faut absolument vivre l’instant plutôt que de perdre son temps à le tuer.

Creative Commons licence
Et soudain le brouillard se déchire
Spectre de Brocken
Gros plan flou sur le spectre
Au dessus de la mer de nuages le soleil brille sans partage
Vol impossible pour l'instant
Génial ! La mer se déchire
En l'air le spectre m'accompagne
Atterrissage réussi
Atterrissage à la chapelle
Pic de Turbat, Olan, Rouye encadrent le clocher
Magnifique église sous l'Olan

Commentaires

François LANNES
08-10-2019 19:45:51

Effectivement, Michel, cela va plus vite en consultant les pages "parapente"...

Je me suis régalé à te lire, une fois de plus.

Et puis je constate que cette sortie, sur le Chapeau, est une pratique décénale en ce qui te concerne... !wink

Greg_
08-10-2019 07:17:39

Comme dirait les anglophones : you make my day !


Luc
06-10-2019 22:19:01

Hé merci pour tes jolis mots Michel ! 

Et quel spectre!!!! 

 Chapeau !!! smile



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