Il n'y a rien de pire que d'arriver au départ d'une balade en montagne sous un soleil éclatant et de voir s'assombrir le ciel subitement avec la montée de la mer de nuages, le temps d'enfiler les chaussures de marche. C'est pourtant ce qui nous est arrivé ce matin.
Comme nous sommes à Pralognan, au coeur de la Vanoise et très loin de la maison, pas question de faire demi-tour. Nous ferons la balade prévue et même si nous ne pourrons sans doute pas voler nous emportons les parapentes et aussi le pique-nique afin de patienter là-haut dans l'attente d'une hypothétique amélioration. Le chemin a été refait et traverse maintenant des barres rocheuses par une impressionnante série d'escaliers en bois entre deux falaises, c'est très ludique.
Au détour d'un lacet, le fond de la vallée apparaît à moitié dégagé entre deux nuages, la fin de l'ascension est une fête ! La mer de nuages se désagrège sur Pralognan ! comme l'avait annoncé la météo ce matin ! Ça n'est plus le triste Stabat mater de Pergolèse qui résonne à mes oreilles mais plutôt l'Ode à la joie ! Le sommet de Napremont où nous sommes a la particularité d'être un belvédère unique sur la Grande Casse, juste en face de nous. L'atmosphère est calme, la vue insolente, nous jouissons de ce panorama unique avec délectation. Mais il est midi et la flamme que nous avons installée donne des signes d'énervement, l'activité thermique se met en place, d'ailleurs quelques coups de vent retors mettent les voiles en chiffon... Ne pas s'énerver. Entre deux boulets de canon, Hélène prend son essor, décollage parfait. Je termine ma préparation et rejoins ma douce sans plus attendre. La mer de nuages a eu la gentillesse de rester en aval de Pralognan, elle est tapie au fond de la vallée à Bozel, prête à engloutir tout aéronef trop intrépide, alors qu'ici le soleil triomphant brille sans partage. Le vol est une gourmandise.
Le terrain d'atterrissage est encore à l'ombre glaciale de la nuit qui tarde à partir de ce côté de la vallée, la faute au Roc de la Valette qui dresse une immense paroi et occulte la lumière. C'est dans un véritable congélateur que nous posons nos voiles, toutefois l'herbe givrée nous permet de plier les parapentes sans les mouiller. Plus haut dans le pré sifflent les canons à neige de la petite station dans l'attente d'une averse qui tarde à venir.