Sortie : Le pas de la Vache

En commençant la balade ce matin nous pensions être peinards. Peine perdue, cela ne fait pas 3 minutes que nous marchons que quatre avions de l'armée de l'air viennent au dessus du Grand Serre, un sommet voisin du notre, et commencent à tourner inlassablement autour. Une heure et demi plus tard, ils sont toujours là au dessus de nos têtes à tourner comme s'ils voulaient brûler du kérosène. Le bruit est insupportable ! On en vient à espérer un crash pour que cesse ce raffut... Mais à y réfléchir ce ne serait pas une bonne chose, une myriade d'hélicoptères débarqueraient et nous empêcheraient de voler. 

Fort heureusement, à court de carburant, ils ont fini par lâcher le morceau, un silence quasi mystique s'est installé, nous permettant enfin d'apprécier à sa juste valeur la beauté du paysage qui s'ouvre au dessus de la forêt. La montée à l'épaule de Brouffier est une alternance de longues traversées à travers des pentes raides reliées entre elles par de courts virages au dessus du vide. Mais par chance l'exposition sud a fait disparaitre toute la neige, elle n'apparaît sous forme de glace qu'à 2200 mètres, peu avant le sommet. Nous y trouvons des conditions idéales, une belle petite brise ascendante et un endroit miraculeusement sans neige pour s'envoler, on va se régaler ! Au loin Grenoble est encore dans le brouillard malgré le soleil bientôt au zénith. Nous nous préparons tranquillement. Hélène s'envolera avec grace tout en débusquant une bonne cinquantaine de chamois tranquillement cachés sous la rupture de pente. 

A mon tour de m'envoler dans ce ciel profondément bleu, manque de bol un dust me dévente la voile juste avant le précipice... Un violent coup de frein me sauve d'une débaroulade sans doute très douloureuse. Je réétale la voile grossièrement et au moment opportun, une nouvelle procédure d'envol est engagée... avec succès cette fois-ci. Rapidement la voile me hisse par dessus le décollage mais je n'aurai pas loisir d'observer des bêtes à cornes, elles se sont toutes planquées sur l'autre versant de la crête. Les couleurs du paysage sont étourdissantes, le vol se prolonge comme un voyage interstellaire, Pesquet peut aller se rhabiller. Errer entre les deux extrémités de la crête de Brouffier est un régal. Mais toutes les bonnes choses ont une fin, j'ai faim et le pique-nique est dans la voiture alors je quitte le firmament et direction le col de la Morte où je retrouve enfin ma douce et une table au doux soleil d'automne pour dévorer les délicieuses petites quiches de l'Esplanade. Elle est pas belle la vie ? 

A peine étions nous installés que deux mirages sont venus tourner au dessus de nous, toutefois les pilotes devaient être moins chevronnés car ils ont décrit de grands cercles à une altitude élevée, ce qui a singulièrement atténué le bruit des réacteurs. Maudite soit l'armée de l'air !