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Sortie : Antidépresseur

Atterrissage en limite de champ sur le chemin

Données de la sortie

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  • Date : 26-05-2023
  • Durée : 02:00
  • Dénivelé : 750 m
  • Distance : 3 km
  • Plafond max : 1800 m
  • Sport : Parapente

Voilà une semaine que je suis sorti de l'hôpital de Rangueil. Si la faculté m'a assuré du caractère mineur de mes vapeurs, il n'en demeure pas moins vrai que depuis ce jour funeste je vis dans l'anxiété d'une rechute. D'ailleurs durant la première partie du retour de Toulouse à Grenoble, j'ai psychoté à mort en craignant un malaise vagal qui aurait été malvenu au guidon de la bécane. Beaucoup moins dans la deuxième partie, faut-il le dire, en raison du beau temps et surtout de l'odeur de l'écurie aux abords du Dauphiné. 

Depuis notre retour, j'erre comme un zombi entre le fauteuil et le plumard, n'ayant plus goût à rien, nourrissant un vague à l'âme persistant qu'entretiennent les avis de décès de personnes pourtant bien portantes fauchées pendant leur sommeil. Aussi, à l'annonce d'une soudaine amélioration décide t-on de tenter une sortie montagne avec les parapentes pour se changer les idées. L'objectif, quoi que modeste, est d'une beauté certaine. Le Connex pointe son sommet isolé au dessus de La Mure, face à l'Obiou et cerné sur les côtés par le Vercors et l'Oisans. Il m'a fallu faire des efforts incommensurables pour sortir de la maison et partir avec la boule au ventre vers l'inconnu, à la limite de la crise d'angoisse ! Heureusement Hélène est là, toujours positive alors j'obtempère sans mot dire et prépare les affaires sans trop y croire. A la première alerte, on rentre ! 

En arrivant à Notre Dame de Vaux les nuages sont omniprésents, d'ailleurs j'ai l'impression qu'ils ont choisi notre sommet pour se rassembler sur les flancs verts de la montagne comme pour me dissuader de sortir. Sitôt avons nous commencé la marche que le bonheur d'être en montagne a repris le dessus sur les angoisses récurrentes. C'est effectivement superbe et les nuées brumeuses donnent un tour wagnérien au paysage. Nous avançons à travers une prairie luxuriante encore trempée des orages de la veille. Un vent capricieux tourne dans tous les sens mais peu importe, marcher c'est vivre. Alors que le ciel semble définitivement bouché, en arrivant au sommet une éclaircie providentielle nous permet de profiter d'une paysage grandiose, et en plus le vent est devenu parfait pour décoller. 

Nous préparons nos voiles avec minutie, mais pas assez comme nous le verrons par la suite. Hélène s'envole avec maestria face à un petit cumulus qui vient de naître à la faveur du soleil toujours plus fort. Elle ne tarde pas à monter comme un bouchon de champagne dans la masse d'air déjà bien instable. Sans vérifier plus méticuleusement mon matériel, je m'envole dans son sillage. C'est en gonflant la voile que j'ai bien senti une dureté dans le frein droit. Un coup d'œil sur l'ensemble du suspentage me rassure cependant, pas de nœud ni de clé dans les ficelles, je peux y aller serein. J'entre dans le thermique en voulant mettre un peu de frein. Rien, pas moyen de tirer la poignée droite, ne serait-ce que d'un petit centimètre. J'y comprends rien, le faisceau de suspente est impeccable. En regardant la poignée droite je me rends compte qu'il y a un nœud à la racine de la sangle bloquant toute action de freinage. Si la configuration n'est pas dangereuse je ne peux néanmoins pas piloter la voile. Il me faut lâcher la poignée et commencer à diriger l'aéronef directement en tirant sur la ficelle au dessus des freins... Une fois dégagé du relief et loin au-dessus du sol, j'entreprends de défaire le nœud totalement serré suite à mes tentatives désespérées de débloquer le frein. La manipulation finit par fonctionner au détail près que je suis maintenant à 1000 mètres du courant ascendant. Trop content d'avoir démêlé la ficelle retorse, je n'essaie même pas de retourner au combat et profite de chaque seconde de cette descente jusque dans la vallée. 

La journée risque d'être mémorable pour les parapentistes si l'on en juge à l'instabilité générale de la masse d'air. D'ailleurs Hélène en fera les frais en se posant bien face au vent mais au moment d'un déclenchement thermique à ras le sol qui lui génère une rafale de vent arrière lors de l'arrondi, avec pour conséquence une glissade sur 5 mètres au milieu des orties ! Plus chanceux, j'atterris dans le même sens sans avoir la moindre turbulence. Inutile de vous dire que depuis ce vol mémorable, je plane sur un petit nuage. Terminées les angoisses, terminée la boule au ventre, la vie est belle et il faut la croquer à pleines dents. Je ne pensais pas que cette petite sortie me redonnerait autant la pêche, non vraiment le parapente, c'est mieux qu'un Xanax !

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