Après un mois d’avril qui s’est étiré sur une cinquantaine de jours, l’été débarque sans crier gare. La saison des bivouacs revient enfin !
Avec toute cette neige présente encore sur les versants nord en moyenne montagne, le choix ne fût pas si évident pour un début juin. On avait vaguement envisagé le Dévoluy et le Châtel, voir même pousser jusqu’au Chamousset mais la Chartreuse et ses hauts-plateaux s’est finalement imposée. Il faut dire qu’elle fût généreuse avec nous cet hiver et ce printemps, et que les vingt minutes de bus tranquilles contre l’heure et demi éprouvante de voiture vers le Col de la Croix-Haute un week-end de l’ascension ont pesé dans la balance.
Bien nous a pris de suivre notre intuition ! Encore une fois la Chartreuse nous a fait cadeau de moments uniques, d’instants merveilleux où finalement on se dit que le paradis, ça peut être ici et maintenant. Un paradis tapissé de dizaines de millions de crocus (sans exagération : avec en moyenne une trentaine de crocus par mètre carré, sur des kilomètres et des kilomètres, faites le compte…), peuplé de chamois gracieux et cabotins, de marmottes joueuses, de fourmis industrieuses, de pins à crochet centenaires embaumant l’air de leurs essences sucrées, de papillons assoiffés de nectar, d’oiseaux chantant la gloire de l’été. On s’est posé au beau milieu de ce petit monde parfait, sur une éminence nous permettant de jouir de ces plaisirs simples, laissant le temps filer jusqu’à baigner dans la lumière de l’heure dorée et au delà.
Au petit matin, après une nuit douce, alors que l’orient prenait la couleur de l’abricot, nos compagnons chamois qui avaient choisi pour dormir une pente orientée vers le levant, se réveillèrent tranquillement en attendant que les premiers rayons du soleil franchissent les Alpes. L’astre colora d’abord le Dôme de Bellefond puis inonda de sa lumière orangée la plaine tapie du blanc et du mauve des crocus. Considérés par l’œil vif et brillant de la femelle-guide de la petite harde, nous ne fûmes pas fuis et le petit groupe vaqua à ses occupations de chamois. On a pu voir ainsi qu’ils se mettent à courir parfois « comme ça » comme le font les enfants quand ils ont un trop plein d’énergie, que les jeunes de la harde font une confiance totale au rôle de vigie de la matriarche, qu’ils aiment glisser pour s’amuser sur les névés et qu’ils raffolent de crocus…
Un bivouac inoubliable !
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