Le temps n’étant pas extensible, il a fallu optimiser le parcours moto avec un sommet dont les pentes se prêtent au parapente. Le Calot de Calvin est justement sur l’itinéraire ! Bien avant l’aube, je m’extirpe du lit douillet pour prendre de l’avance et rejoindre à la première heure Cordéac. Lys Martagon, orchidées flamboyantes, aconits vénéneuses jalonnent le sentier pour le coup pavoisé de couleurs.
En arrivant au parking j’ai cru voir un parapente tenter un décollage depuis le sommet, sans succès d’ailleurs. Toutefois la couleur marronasse de la voile m’intrigue autant que l’heure matinale du parapentiste. Aurais-je la berlue ? Malgré ce signe défavorable, j’entame la marche gaillardement vers le sommet. Un peu en dessous le sommet l’explication m’est donnée par des promeneurs qui descendent déjà vers la vallée. C’est un groupe de zonards, semble-t-il, dreadlocks, sarouels et Djembés sont leurs attributs qui confirment ma première impression. Ils ont dormi là-haut en fumant des pétards toute la nuit au rythme des percussions lancinantes. Ce que j’ai pris pour un parapente n’était qu’une toile de tente qu’ils pliaient.
Effectivement au sommet règne une grande quiétude seulement troublée par un troupeau de moutons sévèrement gardé par un patou menaçant... il n’est pas exclu qu’au décollage j’y laisse une fesse, arrachée au dernier moment par ce vindicatif clébard aux babines retroussées. Heureusement, les moutons subitement se mettent en marche et disparaissent de l’aire de décollage, le patou reste encore quelques minutes à grogner avant de disparaître à son tour. Ouf, je vais pouvoir décoller tranquille. L’envol se fera vers l’ouest dans une bise raisonnable avant de virer au-dessus de la crête pour rejoindre Cordeac à l’opposée du décollage. Si les premières secondes se sont bien passées, l’arrivée dans la face orientale surchauffée a été plus que sportive, une méga fermeture de la voile calme mes ardeurs belliqueuses à me prendre pour Chrigel Maurer.
Tout en bas, Hélène vient d’arriver et il va falloir soigner l’atterrissage... Au dernier moment, je distingue une ligne électrique qui avait échappé à ma sagacité matinale. L’approche est laborieuse et la prise de terrain des plus bordéliques. J’ai bien failli m’emplâtrer la clôture de gros fils de fer barbelés, il m’a fallu soulever les jambes pour passer. Pas très académique tout ça. Bref sitôt la voile pliée nous repartons en moto vers le sud. Mais ça, c'est une autre histoire.