Généralement, on ne connaît des Iles Féroé que son équipe de football, qui assure trois points à presque toutes celles qu’elle affronte, et à travers la pratique de la chasse au globicéphale, qui donne à la mer une tonalité rouge qu’elle ne doit pas au coucher du soleil…
Il en résulte qu’on prend souvent le féroïen pour une forme de brute, viking et archaïque, qui adore torturer les gentils dauphins pour se prouver sa virilité et courir après un ballon pour satisfaire ses instincts guerriers. Tant mieux, c’est peut-être aussi pour cette raison que l’archipel est si bien protégé… Au cours de mes séjours, je me suis aperçu que la plupart des personnes qui ne s’y sont rendues qu’une fois ne le sont que parce qu’il s’agit de la première. J’en suis à la troisième et je suis encore, je le sais, loin du compte. Je ne saurais pas dire ce que l’on y vient chercher… pas plus que je ne saurais définir ce que l’on trouve. Mais si l’on revient aussi aisément, c’est qu’il est évident qu’on le trouve. En parcourant Bivouak, je me suis aperçu que ces îles ne figuraient nulle part, bien qu’on mentionne diverses destinations scandinaves… Je me suis résolu à entrer les premiers topos, espérant que les découvreurs de sentiers d’ici s’attacheront à en créer bien d’autres |
J’espère par cet article ouvrir une petite brèche…
Données principales
Statut politique |
République autonome du Danemark depuis 1948 |
Gouvernement |
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Géographie |
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Point culminant |
1 399 km² (18 îles) 882 m (Slættaratindur) |
Démographie |
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Population (2004) |
48 000 hab. |
Langue(s) |
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Survol de l’histoire
Les premiers à avoir l’idée de venir s’installer sont des moines irlandais, autour de l’an 800. Ils avaient une excuse ; ils ne savaient pas à quoi s’attendre. Et encore, on ne sait pas si leur arrivée correspondait vraiment à une idée…
Ensuite, ce sont les norvégiens qui débarquent. Selon les textes, c’est le brave Grímr Kamban qui s’y colle. Là encore, savoir pour quelle bonne raison il est arrivé est un peu flou. Certains avancent que, comme pour la colonisation de l’Islande, il cherchait à fuir le célèbre Harald l’ébouriffé (qui deviendra bientôt Harald à la Belle Chevelure). Les textes n’étant pas particulièrement précis, il se peut qu’il soit en fait arrivé un peu avant que le tyran ne prenne le pouvoir. Ce qui semble certain, c’est que Grímr ne devait pas juger indispensable la compagnie de ses voisins…
La colonie se développe tranquillement, elle sert d’escale à ceux qui voguent vers l’Islande. Au XIème siècle, Sigmundur Brestisson, s'impose comme chef de l'archipel au nom du jarl Håkon Sigurdsson et les îles deviennent une possession du roi de Norvège Olaf Tryggvason (pas le saint !). C’est un peu le début de la fin : la domination norvégienne se maintient jusqu'en 1386… puis sont intégrées à l'Union de Kalmar, puis à la double monarchie Danemark-Norvège puis au Danemark tout seul au début du XIXème... Quelques siècles permettant à la petite nation de connaître des famines notables et des épidémies... La démographie n'a véritablement commencé à croitre significativement qu'à la fin du XVIIIeme
Peu d’autonomie… jusqu’au statut de République Autonome du Danemark (1948) qu’elle est encore aujourd’hui. Pour faire très simple, les Iles disposent de leur parlement, leur exécutif et leur législatif… Les questions d’ordre international sont laissées à l’appréciation du Danemark qui verse une subvention très convenable en échange du droit d’envoyer ses scouts là-bas en camps de vacances.
Les Féroé ont leur propre monnaie (1 couronne féroïenne vaut rigoureusement 1 couronne danoise) et n’appartiennent pas à l’Union Européenne.
Économie
Autant être concis. L’économie des Iles Féroé est basée sur trois secteurs :
- Le poisson
- Le poisson
- Le poisson
Que ce soit la pêche, la transformation ou la pisciculture… tout repose à peu près sur ça. On parlera aussi du mouton et de la laine (les vêtements branchouille en laine, c’est là bas que ca se passe !). Actuellement, une prospection pétrolière est en cours.
Art, gens et culture
Globalement, l’histoire des Féroé correspond à la longue tutelle d’un territoire coupé du monde. Il ne faut donc pas s’attendre à visiter Rome en arrivant à Torshavn. C’est une culture de survivance qui s’était axée sur un lien communautaire fort et une proximité immédiate avec l’environnement (et on comprend vite que c’est l’environnement qui décide là-bas). Pour preuve, leur langue à peu évolué en 1000 ans et demeure avec l’islandais le dialecte le plus proche du vieux norrois des vikings.
Attention, les féroïens ne sont pas pour autant les bouseux du bout du monde qu’on pourrait imaginer ! Il s’agit d’une population étonnamment moderne et ouverte sur le monde : le design de leurs intérieurs convaincra les plus sceptiques. En un mot ; ils sont scandinaves. La culture identitaire y est évidente, marquée, entretenue, mais elle n’a pas les relents de nationalisme qu'on pourrait éventuellement trouver sur certaines autres îles situées dans la méditerranée par exemple ! Elle n’est que le fruit d’un lien social particulièrement fort.
L’ambassadeur artistique de l’Ile est Samal Mikines, peintre originaire de l’île du même nom (à part qu’elle s’écrit avec un « y »). C’est sans doute le seul local dont la réputation a traversé les frontières du royaume du Danemark. Son travail a largement appréhendé le thème du deuil. Originaire qu’il était d’un village de pêcheurs au sein duquel un monument aux disparus en mer propose une assez longue liste, on voit mal comment il aurait pu en être autrement. C’est aussi ça, la vie aux Féroé…
Géologie des Féroé et relief
Toujours en mode express, il s'agit de cailloux d'origine volcanique : basalte du tertiaire avec des couches de tuff. Ensuite, les glaciers ont crée des Fjords avant de se retirer. Globalement, les paysages ressmblent aux fjords de l'est islandais, pour ceux qui connaissent. Le relief évolue en permanence entre le niveau de la mer et 882 m, point culminant. Des plateaux et des monts, un peu partout...
Pourquoi y aller ?
Pour ceux qui se posent encore la question, voici quelques éléments de réponse...
L'authenticité.
Je ne vois pas ce que je pourrais en dire de plus. Pas de folklore superfétatoire, pas de clichés commerciaux car pas de corruption liée au tourisme ou à l'acculturation. On peut se confronter en toute simplicité à un mode de vie totalement différent de celui qu'on connait. Cette simplicité, loin de tous les semblants, est peut-être une forme ultime de luxe dans le cadre d'un voyage dans le monde « civilisé »
Les gens
Comme je l'évoquais plus haut, ils sont résolument modernes et ouverts. Affables, ils demeurent scandinaves et réservés. Ils sont cependant aussi heureux de rencontrer votre culture que vous l'êtes de découvrir la leur, même quand ils n'ont rien à vous vendre! Rien de plus simple que d'aller à leur rencontre (ce sont d'ailleurs souvent eux qui vont à la vôtre) et de partager quelques bières locales.
Les murs en pierre
J'imagine qu'il y a quelques siècles, il n'était pas évident de se faire livrer du Danemark quelques kilomètres de grillage pour séparer les parcelles immenses ou paissaient les moutons. Le féroïen, qui n'était pas franchement menacé la consommation chronophage de la société des loisirs, s'est donc attelé à trouver une solution pour séparer ses bêtes de celles de ses voisins. Il a du opter pour le mur en pierre. Parout, de longs serpents de basalte dessinent des lignes et des courbes sur le vert des paturages. Il ne s'agit que de blocs, empilés sur une hauteur de 1 m, sans liant ni taille. La quantité de travail qu'ils représentent est ahurissante. Je crois qu'elle est finalement à l'image de ceux qui les ont bâtis. Aujourd'hui, on trouve de plus en plus de grillages...
Les oiseaux
La documentation sur le sujet est facile d'accès... On trouve à peu près tout ce qui peut voler dans l'arctique. D'avril à Aôut, c'est la fête! Les bruits, les mouvements, c'est un spectacle assez incroyable. Je me suis surpris à rester une heure au sommet d'une falaise, à regarder le vol des fous de bassan. Franchement, Bouddha aurait pu être féroïen si l'hiver avait été un peu plus court...
Les paysages
La montagne au niveau de la mer, ça fait deux bonnes raisons d'y aller. On ne trouve pas d'arbres aux Féroé, juste une herbe extraordinairement verte qui envahit tout ce qui n'est pas purement vertical. Les lumières du Nord et surtout, la solitude/quiétude. Les heures de marche avec pour seule compagnie les oiseaux, les moutons et le vent...
Le stress
On se demande ce que c'est. Il n'y a sur ces îles absolument aucun son ou élément susceptibles de produire l'effet d'une agression. Ca a pas l'air comme ça, mais ça change considérablement du quotidien! Bien sur, il faut considérer qu'une attaque de skua n'est pas un élément que l'on pourrait comparer sur une échelle de mesure de l'agressivité à la sonnerie de fermeture des portières du métro...
Anecdotes
Les voitures du parking
Pour donner une idée du calme qui règne, on peut réserver chez certains loueurs des véhicules qu'ils laissent attendre sur le parking de votre choix. Les clés sont sur le tableau de bord. On les laisse au même endroit en partant en glissant l'enveloppe contenant le prix de la location dans la boîte à gants...
Le vieux de Gjogv
Alors que je me promenais vers Gjogv (prononcez Diekv), je vois à quelques centaines de mètres une silhouhette qui avance péniblement. Jean, pull en laine à motif et canne ; pas de doute, c'est un vieux féroïen. J'arrive près de lui, il me fait signe et là surprise ; il a le visage en sang. Je remercie le seigneur de veiller ainsi à la quiétude de mes vacances et me prépare à affronter le genre de moments qu'on déteste tous (ou presque) : la gestion de l'urgence. Bonus, il n'y a que trois hopitaux sur l'ile. Le plus proche est à 40 minute de route. La route elle-même étant à une heure de marche. Merci à l'inventeur de l'hélicoptère, me dis-je secrètement.
Je m'approche de lui, il doit avoir 75 ans. Il a globalement la lèvre inférieure fendue. Quelque part, c'est rassurant. Il m'explique qu'il est tombé sur une pierre. J'ai toujours ma pharmacie sur moi (merci « copain des bois » pour tes précieux conseils!) et commence à nettoyer sa plaie, mais je ne suis pas spécialiste des muqueuses. Je lui propose donc de l'accompagner au village ou d'appeler des secours, parce qu'il a quand même l'air un peu choqué par sa chute (la vilaine ombre du malaise vagal plane). Il s'assied et, fort de tous les épisodes de grey's anatomy que j'ai vus, je pense qu'il est nécessaire de faire au moins un point. Mis à part un atelier broderie en EMT au collège, mon expérience en couture est faible... Il récupère, j'insiste pour l'accompagner. Il m'explique qu'il est sorti pour surveiller ses moutons et qu'il doit rejoindre sa bergerie (environ trois heures de marche à son rythme et trois de plus pour le retour). J'insiste pour l'aider à redescendre parce que ca saigne encore pas mal...
« I have to see my sheeps »
Bien, j'ai compris... Je lui donne quand meme quelques compresses en insistant une dernière fois. Il me remercie, m'assure que tout va bien et reprend son ascension. Inquiet, je décide de le suivre du regard et quand il disparaît dans la pente, je remonte à mon tour et le suis de loin pour m'assurer que tout va bien... Tout semble aller, je redescends... J'aurais sans doute du lui proposer d'aller les compter pour lui...
Leur proximité
La proximité qui les lie me fascine. Dans les salons d'attente des aéroports, à Londres ou a Copenhage, il est assez frappant de voir avec quelle facilité ils communiquent. Ils semblent immédiatement capables d'échanger. Le contraste avec ma propre existence me surprend et m'inquiète. Rapidement, ils vous intègrent... Le plus amusant est que bien des rencontres fortuites que l'on fait se réitèrent avec les mêmes personnes. J'ai pu partager une cigarette avec un inconnu à la récetpion d'un hôtel et le recroiser 5 jours plus tard en faisant le plein à une station à l'autre bout de l'île. De même avec les passagers du vol, au hasard d'un chemin sur une île perdue...
Voilà... De nombreuses photos sont disponibles sur ma page . Je vais tâcher d'alimenter quelques topos, espérant que ce ne seront pas les derniers...