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Depuis qu’en août 2003 ( !) j’avais failli mourir de soif à la redescente du versant ouest du Cheval Blanc (que j’avais eu l’imprudence de gravir droit dans la pente, sous un soleil de plomb, depuis Archail via la crête du Pré de l’Evêque et le Col de Cine !), je ne suis plus retourné au Cheval Blanc. Mais là, l’envie m’a enfin repris d’y remonter, mais plus raisonnablement depuis Chavailles via le Col de Talon, avec près de 3 litres d’eau… et l’intention de fouler, si possible jusqu’au sommet du Cheval Blanc, l’immense crête de cette montagne magique.
Une autre tentative, encore plus ancienne, par ce dernier itinéraire m’avait déjà laissé un mauvais souvenir : suite à une longue et infructueuse recherche de la bonne voie, j’avais quand même fini par accéder je ne sais comment au Col de Talon, mais dans un tel état d’énervement et de fatigue que je n’étais pas allé bien loin sur la crête…
Cette fois donc, j’ai soigneusement étudié l’accès (un peu tortueux il faut bien l’avouer – d’où mes précisions dans le topo !) jusqu’au Col de Talon, et malgré un petit écart involontaire mais assez vite rectifié, je suis arrivé sans trop de retard au pied du couloir sous le Col. Météo idéale, très beau mais pas trop chaud, quelques nuages par ci par là, que demander de mieux ? Et puis absolument personne de toute la journée, sauf un petit chamois dans les éboulis sous le Col et quelques marmottes au loin sur les alpages (apparemment, vu parfois l’absence de trace dans les herbes entre 2 cairns, cet itinéraire n’est pas très fréquenté).
Le raide couloir m’a quand même donné du fil à retordre ! Question : par où passer au mieux sans trop s’épuiser ? Le mieux avais-je lu serait de passer sur la gauche du couloir (rive droite donc), où il y aurait une ligne de cairns. J’ai cherché, en vain. Donc j’ai tenté successivement les pentes herbeuses (assez glissant), les gros blocs de l’éboulis au milieu du couloir (assez pénible), et enfin le fond rocheux du ravin tout à droite, qui se remonte finalement assez bien… sauf vers le haut, où certains pans de rocher, trop lisses à mon goût, m’ont fait sortir du ravin et terminer dans l’éboulis, plus rassurant à cet endroit…
Une fois arrivé au Col, non ce n’est pas "la fin des difficultés", mais le début d’une seconde tranche, infiniment plus gratifiante il est vrai : le régal commence ! Montées, descentes, dans un paysage de rêve, je ne sais plus où donner du regard, d’autant que la vue porte très loin aujourd’hui, il y a tant de sommets et de vallées à identifier… mais aussi tellement de fleurs à admirer à mes pieds, je marche sur une crête tapissée sans cesse de nouvelles variétés : joubarbes, orpins, saxifrages… et tant d’autres que je ne connais pas se succèdent, rouges éclatants, jaunes vifs, bleus intenses, mauves profonds… un vrai feu d’artifice !
L’ascension du Paluel sur le fil est un plaisir en soi, et puis les sommets plus modestes et les baisses défilent, et peu à peu la cime du Cheval Blanc qui m’a paru si lointaine se rapproche. Sur l’un des sommets, je vois des bouts métalliques tout tordus dépasser du cairn, c’est quoi ce truc… j’essaie même d’extraire ces machins informes… quand soudain je suis pris d’un doute… mais oui… ne seraient-ce pas des débris de l’avion qui s’est écrasé ici sur ces pentes en 1948, faisant plein de morts, sans compter ceux qui leur ont succédé quelques jours plus tard, dans le second avion venu à leur recherche et qui a connu le même sort ? L'hypothèse se renforce peu après, avec la croix métallique (construite semble-t-il avec les débris du 1er avion ?) fichée sous la crête peu avant le sommet de la Mulatière : devant une telle accumulation de merveilles entre ciel et terre, j’avais totalement oublié cette terrible double catastrophe !
Et quand, passée la Mulatière, je regarde ma montre, je vois qu’il est déjà 15h30 : à regret, je décide d’arrêter là ma chevauchée, car il me reste encore le même long chemin à refaire… dans l’autre sens ! Et si je ne veux pas rentrer à la nuit, le demi-tour s’impose. Déçu, je décide de revenir dès que possible, mais bien décidé alors à respecter un timing en béton !
Malgré cela le retour sera encore un immense plaisir, je découvre même quelques superbes bouquets d’edelweiss qui m’avaient totalement échappés à la montée !
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