Ce qu'il y a de bien avec Dédé, c'est que nous n'avons pas besoin d'acheter un billet pour un voyage organisé avec Mike Horn à l'autre bout du monde, il suffit de suivre la trace qu'il laisse du bout de ses spatules.
Ce matin par exemple, Dédé nous donne rendez-vous à 9h chez lui pour un petit café et des chocolats, c'est qu'il s'agit de prendre des forces car l'itinéraire qu'il nous a concocté ne sera pas une sinécure. Le départ est à la station du Planolet, nous n'avons pas mis les skis qu'on se fait déjà admonester par le directeur des remontées mécaniques qui nous somme de ne pas passer par les pistes. Heureusement Jacques connait bien le quartier, nous partons donc sur la route des Fraisses, une large piste qui ne monte absolument pas, vous conviendrez que pour rejoindre le sommet, ce n'est pas vraiment efficace. Au bout de quelques kilomètres, une trace s'ecarte brutalement dans la pente nous permettant enfin de prendre un peu d'altitude. Hélas ce fil d'Ariane nous mène dans un dédale de reliefs infernaux. Aussi Dédé nous sauve la mise en nous faisant faire une traversée descendante pour rejoindre une crête bien au nord de notre objectif.
A partir de ce moment nous évoluons loin de toute civilisation, sans la moindre trace, comme si nous étions perdus dans le grand nord canadien. La Scia, objectif pourtant classique et pratiqué par des centaines de randonneurs, nous offre un côté sauvage totalement inattendu. Quel bonheur de suivre cette crête parfois aérienne où la neige est immaculée, seulement traversée parfois par une trace animale. Ce qu'il y a bien avec Dédé, c'est son imperturbable optimisme alors que nous évoluons sur une crête parfois pas plus large que nos skis.
Nous finissons enfin par rejoindre une trace de montée puis plusieurs autres qui convergent toutes vers le sommet. Ces petites digressions géographiques nous auront fait passer pas mal de temps pour rejoindre la cime, mais on s'en fout on n'est pas à la Pierra Menta. Avec toutes ces péripéties, il est grand temps de casser la graine, ce que nous faisons volontiers, notre pique-nique sera largement étoffé par les délices préparés par Marie ou offerts par Thierry. Étrangement il n'y a pas grand monde au sommet, il faut dire qu'il est déjà tard.
Mais il est l'heure de descendre. Quand Dédé nous annonce qu'il va falloir remettre les peaux durant la descente, Jacques déglutit et avale de travers sa barre de céréales, unique aliment de sa pause méridienne. Du coup deux groupes sont donc constitués, celui qui descendra directement sur Saint Pierre, l'autre qui suivra notre Dédé hors du schéma logique de la descente. Nous laissons Jacques filer sur les anciennes pistes qu'il a si bien connues jadis pendant que le reste de la troupe remet les peaux de phoque sous les semelles des planches pour une remontée finalement très modeste. Nous arrivons au sommet d'une magnifique piste abandonnée exposée au nord avec l'avantage non négligeable d'être recouverte d'une neige encore froide et légère. Dédé ouvre la voie à fond les gamelles sans éviter de se prendre deux boîtes monumentales pendant que le reste du groupe suit beaucoup plus prudemment en profitant de cette neige effectivement grisante tant elle est encore légère. J’ai oublié de vous parler de notre compagnon du jour, un toutou bien gentil qui nous a pris ce matin en affection sur le parking et nous a suivi toute la journée, galopant sans cesse dans la neige profonde sans jamais faiblir !
Ce qu'il y a de bien avec Dédé, c'est que même la Scia, objectif pourtant modeste, devient une aventure extraordinaire ! On l'aime notre Dédé !