La Pinéa par la voie du Vermorel

Ce matin à Provezieux j'ai cru que c'était raté car il n'y avait pas vraiment de plafond bien défini, les nuages trainaient nombreux à toutes altitudes, comme avant le mauvais temps. Et puis petit à petit, la mer de nuage immense s'est soudée pendant que je suivais la trace dans une forêt magnétique. Je suis monté dans un silence total, l'épaisse couche de neige absorbant tous les sons comme dans une chambre sourde. Ça m'a tout de suite fait penser à François dans sa draye silencieuse. Qu'il est doux de ne rien entendre. Parfois le chant discret d'un piaf. Ce silence épais exacerbe les sensations et celle d'exister est alors perceptible. Le rythme du cœur, celui de la marche... Au début était le rythme, c'est une certitude.

Le passage au dessus de cette mer de nuage est une fête. La couche de neige est énorme et parfaitement homogène, c'est devenu rare de voir des neiges d'une telle qualité. Je me réjouis déjà de la descente. A la brèche le soleil inonde l'espace, le contraste est violent, Humm. Toute la montée est plongée dans un silence monastique et glacé.... et là-haut la vue jusqu'au delà de l'horizon, le vent siffle. C'est l'éblouissement (il faut dire que je n'ai pas de lunettes de soleil). Les trois anciens qui m'ont doublé tout a l'heure poursuivent en contrebas en skis. Je laisse mes escalopes magiques (cf www.bivouak.net/topos/course-id_course-1200-id_sortie-7409-id_sport-1.html) et prolonge la balade par cette arête aérienne jusqu'au sommet.

Alternance de neige épaisse et de glace entre les rochers, quelques passages raides se négocient au prix d'un brassage intense, d'autres sur l'extrême pointe avant des chaussures, c'est finalement pas très long et pas si difficile que ça.

Quant à la descente du sentier de Vermorel, c'est une bonne surprise. Il existe de belles combes peu boisées, et dans cette neige vierge c'est l'éclate totale. L'appel de la poudre est trop fort, je descends droit sur une barre, bien à gauche de la trace. Au bout d'un moment je suis au bord du vide. Je suis bon pour remonter chercher la trace. C'est une bataille pour la retrouver, j'ai la flemme de remettre les peaux. La suite est un peu moins excitante, il y a des traces. Cela dit mes pelles à tarte les gomment et ne laissent que le plaisir de la glisse.

Ce fut un peu court mais diablement bon. Maintenant j'apprécie cette douce situation: Après la rando une bonne bière. L'un ne va pas sans l'autre, la bière tout seul, ça fait poivrot, la rando tout seul ça fait ascète..... alors que le mélange des deux est détonnant.