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Deuxième tentative cette année, et ce ne sera pas encore la bonne !
Départ de Villard-de-Lans sous une grisaille tenace. Je doute sur le grand beau temps annoncé mais je reprends rapidement espoir au Pont de l’Amour, sous les premiers rayons d’un soleil qui ne me quittera plus de la journée. Un peu plus haut, j’entends puis j’aperçois la silhouette fugitive de deux biches à moins que ce ne fussent des chevreuils. Dans une folle cavalcade, ils ont dévalé la pente forestière. Ils ont raison d’être aussi alertes. Il ne fait pas bon être biche ou chevreuil par les temps qui courent, avec tout ces hommes à casquette orange fluo aux mauvaises intentions, lâchés dans la nature. Pour le moment, je n’ai cependant pas encore entendu de coups de feu.
Arrivé à la cabane de Roybon, le panorama s’ouvre sur les falaises qui vont du Cornafion jusqu’à la Grande Moucherolle. Tout est blanc au dessus de 1700-1800m, avec des névés à partir de 1500m. Je ne vois pas la combe Chaulange ni les Rochers de l’Ours d’ici mais je me doute que ça ne devrait pas être très différent. J’hésite à me contenter du col Vert mais un très grand groupe appartenant à un club de marche y va aussi et j’ai envie d’un minimum de tranquillité !
Direction le sentier Gobert, long sentier qui relie Roybon au col de l’Arc quasiment en courbe de niveau, à travers la belle forêt qui surplombe la plateau. Les vues sont jolies, le sentier agréable, on peut presque marcher le nez au vent tant la marche est facile sous ce doux soleil. C’est donc d’humeur bien ravigotée que je débouche sous la combe Chaulange. Au creux du thalweg, sur le sentier, un groupe de trois chasseurs devise gaiement. En m’approchant, je m’aperçois qu’ils ont tué un chamois. Le corps de l’animal sans vie est posé sur le sol, ses yeux sont grand ouverts. Ses cornes ne sont pas bien grandes, il doit avoir tout au plus trois ans. Machinalement, je dis bonjour aux chasseurs, et je me sens un peu hypocrite.
Un peu refroidi, je m’engage sur le rude sentier un peu glissant qui monte presque tout droit dans la raide pente qui borde les petits abrupts qui surplombent la rive droite de la combe. L’ambiance est superbe, avec les falaises massives qui partent des Rochers de l’Ours vers le Cornafion, la combe sauvage et les pentes raides et fuyantes vers le sommet, de plus en plus blanches au fur et à mesure que je m’élève. Au pied du Cornafion, sur le plateau, une grande harde de bouquetins mâles se repose.
J’arrive au pied des premiers abrupts qui défendent les cent derniers mètres et je commence un peu à me poser des questions. Le neige est bien présente mais surtout, elle a une consistance un peu douteuse, croustillante sur le dessus, granuleuse en dessous, reposant sur une herbe encore vigoureuse et couchée. Dès que c’est un peu raide, ça se détache par gros morceaux, glissant sur l’herbe comme une luge. Bof bof. Je commence à grimper et passer de vire en vire en essayant d’éviter les névés sur les pentes d’herbe trop raides et de rester dans les rochers. Mais le rocher est délité et presque chaque pas demande de l’attention. Je commence à me sentir un peu bête tout seul dans cette pente exposée et le pain de neige décroché par mon pied, prenant de la vitesse sur l’herbe couchée et s’écrasant plus bas sur une vire en un gros splotch agit comme un signal d’alarme.
Je dois être cinquante mètres sous le sommet et je me dis qu’il serait plus raisonnable d’en rester là pour aujourd’hui. Je me trouve un beau rocher et bien calé sur une vire, je sors mes victuailles. Je m’aperçois qu’il y a quelques étagnes et leurs petits un peu plus haut sur la droite, la où la pente est la plus abrupte. Parfait pour agrémenter la pause déjeuner ! Dans la combe, un groupe de quatre corbeaux fait des va et vients, communiquant à grands renforts de « rôôôk rôôôk rôôôk » et autres innombrables phrases dont sont capables ces oiseaux intelligents et bavards. Sur le plateau du Cornafion, un groupe de parapentistes a fait fuir la grande harde de bouquetins mâles.
Je redescends très concentré, sur les fesses quand nécessaire et regagne les pentes herbeuses où l’exposition disparaît. Par un hasard miraculeux, aucune glissade ne sera à déplorer sur la sente pentue et boueuse qui descend jusqu’au paisible sentier Gobert.
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