Il fallait absolument retrouver cette étrange sensation ressentie hier à Orionde, alors aujourd'hui nous sommes allés au Chapotet, un autre sommet satellite plus au nord de la chaîne de Belledonne. Encore une fois, les contrastes sont saisissants, nous évoluons là-haut comme dans un rêve au milieu des crocus et des anémones pulsatilles naissantes. La neige termine de disparaître autour de nous, laissant libre cours à la floraison. Et par-dessus, gigantesques, granitiques, les plus hautes cimes couvertes de neige pourraient nous faire croire sur un autre continent. Cette dualité entre l'univers de glace des hautes altitudes et l'accueillante verdure de la vallée nous fait penser aux profondes vallées népalaises.
Comme hier, nous avons rendez-vous au sommet du Chapotet avec le calme et la sérénité, si le paradis existe il doit y ressembler ! Nous posons nos sacs et remplissons nos poumons de ce vibrant air pur, on est bien. Une petite brise parfaite venant de la meilleure direction pour décoller nous inspire, le vol devrait être une gourmandise et il le sera ! A 10h45, le parcours est déjà émaillé de magnifiques ascendances, larges, douces, sans turbulence, comme si le monastère bouddhiste juste en dessous de nos pieds irradiait, nous faisant entrer en lévitation ! Il suffit de tourner inlassablement pour se maintenir, alternant d'un côté les pics enneigés et de l'autre les riantes vallées éclatantes de verdure.
Curieux de savoir s'il souffle réellement un courant cosmique depuis le temple bouddhiste de Saint Hugon, nous nous proposons d'aller y faire un saut au retour de notre mémorable vol-rando au Chapotet. La route pour s'y rendre est quelque peu chaotique suite à des effondrements, mais nous ne sommes pas au bout de nos surprises, le magnifique bâtiment a été ravagé par les flammes, le souffle divin n'a pas que des avantages. Reste cependant debout la grande stûpa de l'enseignement aux multiples portes propices. Il faut reconnaître la dimension spirituelle de la construction avec de nombreux drapeaux à prières flottants dans la brise anabatique, avec en arrière plan les sommets enneigés c'est du plus bel effet.
Confortablement installés sur un banc, nous contemplons l'édifice dressé dans le ciel et restons dubitatifs, il y a bien une brise ascendante agitant les petits grelots, laissant s'échapper dans l'azur un harmonieux tintement céleste ! Si la corrélation entre le monastère et les courants ascendants reste à démontrer, les impressions népalaises de notre balade du jour n'en demeurent pas moins durables, bien au delà du vol au dessus de la stûpa bariolée.
Marc Billat