Rebelote ce matin pour la Perdrix depuis la Scie du Bost. C’est mon entrainement à la demi-journée préféré, en alternance avec la Perdrix toujours mais à partir de Doizieux, ou encore Salvaris depuis Izieux/Saint-Chamond. Il fait un froid glacial ce matin, de quoi (presque) regretter la récente canicule… Ne reste plus qu’à monter d’un bon pas, efficacité garantie, comme d’hab.
Et là, tout en pressant le pas dans ce chemin qui grimpe assez fortement en sous-bois, je prends peu à peu conscience que tout compte fait, il n’est pas si anodin que ça, ce chemin. Il mène d’abord en larges lacets bien pierreux jusqu'aux abords du Saut du Gier, puis de là, plus rudement encore dans son tronçon désormais débalisé, à la Jasserie, avant de musarder, enfin aimable, dans les pâturages et la lande jusqu’au sommet du Pilat. Certes, pour l’avoir parcouru tant et tant de fois, je le connais par cœur. Et pourtant je ne m’en lasse pas. Ne serait-ce pas parce qu’il est, justement, bien plus divers et plus sauvage que je ne me le représentais jusqu’alors dans mon esprit ?
Il est vrai que je n’ai jamais cessé d’explorer des variantes de cet itinéraire "classique" - variantes de montée côté Saut du Gier, dans le chirat et les raides rochers au plus près de la cascade, et de descente de l’autre côté, par un raccourci plus paisible que j’ai progressivement découvert et cairné. Et ce matin encore, je n’ai pas pu m’empêcher de rajouter ou de rafraichir quelques cairns le long du raide "mur" débalisé au-dessus du Saut du Gier. Et j’ai déjà en projet une ou deux prochaines sorties destinées à améliorer un autre parcours, plus sportif encore et très peu connu, celui qui tente de suivre au plus près la cascade du Gier, dont je n’ai finalement pu longer jusqu'à présent que la partie basse qui grimpe dans les blocs du chirat attenant (mon topo Crêt de la Perdrix par le chirat du Saut du Gier et le cours supérieur du Gier)
Et ce matin, plus que jamais, même ce parcours classique et toujours très fréquenté m’est apparu bien sauvage. Dès la première bifurcation, les caillasses, les dalles et les blocs encombrent le chemin et toute la forêt alentour – même si un doux tapis de mousse d’un vert chatoyant les dissimule parfois hypocritement aux regards. Dès le second virage en épingle, on frôle une énorme coulée de blocs : le chirat dans toute sa splendeur ! Et que dire du "mur" qui vous attend à la hauteur du Saut du Gier, facile sans doute, pas bien long à remonter en effet, mais qui demande quand même qu’on se raccroche ici et là à un bout de rocher, à un tronc, à une branche, et même à des racines de pins qui sont autant de prises bienvenues pour les pieds ou les mains ? Puis une fois sorti de là, pour peu que l’on s’éloigne un peu des traces pour aller contempler à gauche le festival de falaises dans lesquelles plonge le Gier (et dont certaines font aussi office de rochers d’escalade) : n’est-ce pas là un autre "Gouffre d’Enfer" en écho à celui, non moins sauvage, où se dresse le barrage du même nom, aux portes de Saint-Etienne ?
Puis voici que j’émerge soudain en plein soleil sous les bâtisses de la Jasserie : je m’ébroue, comme sorti d’un rêve éveillé. Il fait bon ici, il fait presque chaud, il y a des gens qui se baladent dans les sentiers au milieu des pâturages, des bruyères et des myrtilliers. Je monte comme toujours à la Perdrix, mais droit dans le mini-chirat sommital, hors traces pour un ultime petit plaisir. Tiens, pour la première fois depuis des mois on revoit enfin le Mont-Blanc. Mais cette fois sa réapparition ne me fait pas plus d’effet que ça, et Je redescends vite me replonger dans les sous-bois chaotiques et les sentiers caillasseux qui font tout le charme du Pilat. Un massif aussi rude et rugueux en fin de compte que les Monts du Lyonnais sont bucoliques, et les Monts du Forez métaphysiques ?