En arrivant sur le parking à coté du terrain d'atterrissage, la belle lumière du matin n'arrive pas encore à réchauffer l'atmosphère paisible. Un lièvre, puis deux et enfin un troisième déboulent, ils sont impressionnants, des pattes de chien, du poil de sanglier et des oreilles d’âne ! Ils font la sarabande avant de disparaitre dans un fourré... la marche peut commencer.
La quiétude des lieux est telle qu'elle fait craindre un décollage fastidieux dans la neige profonde... Je rassure Luc en lui rappelant qu'aujourd'hui, ce n'est pas la pétole que l'on risque de trouver là-haut, mais une bise féroce venant du sud, en tout cas c'est ce que toutes les météos s'accordent à dire, nous verrons bien. La balade est toujours aussi plaisante, le repérage de Marc est un bon plan, pour l'instant je n'ai jamais eu à redescendre à pince.... alors on y croit aujourd'hui. La neige apparaît en même temps que l'on sort de l'ombre glaciale, elle a un aspect soyeux et crisse parfaitement sous la semelle, avancer sur cette surface immaculée est un plaisir. J'en regretterais presque les skis.
Arrivé à la croix du col de la Sciaz, une sympathique petite brise se fait sentir, nous terminons la balade sous un franc soleil. Cependant une inquiétude commence à poindre, le vent jusque là notre ami, commence franchement à forcir, en plus il est carrément instable. Peu avant la crête sommitale, les arbres sont secoués et grondent dans la rafale.... le moral en prend un coup. Pourtant presque en haut l'ambiance est encore fréquentable pour le vol. Le seul souci c'est la neige, c'est du béton et sa surface est lisse comme une patinoire...
Sitôt au sommet il s'agit de ne pas trainer, il paraît que ça va forcir.... Les conditions nous imposent une séance de gonflage particulièrement tonique, il est absolument impossible d’étendre la voile. Elle se tortille et s'agite comme un cheval cabré. Il s'agit d'attendre une accalmie pour gonfler face voile avant de se retourner prestement. Patienter jusqu'au prochain créneau est déjà un exercice délicat, la voile gigote dans tous les sens sur la surface glissante de la neige encore glacée. Un premier essai se solde par une fermeture monumentale au dessus de la tête. Un peu d'attention et hop la deuxième tentative est la bonne. En l'air, hors de question de lâcher les freins, la masse d'air est mouvante comme un torrent qui remonte dans le vallon. Heureusement plus on descend, moins le courant se fait sentir. Le vol ne durera pas longtemps, trop de vent météo nuit à ma sérénité. À l'attéro, l'air est plus calme bien qu'inconstant. Mon approche que je croyais la bonne est finalement totalement contraire à la bienséance... vent de cul. Alors que je m’apprête à faire un cratère dans la pelouse fraichement dégelée, une bouffe sympathique me soulève au dernier moment et me pose littéralement comme une plume.... coup de bol phénoménal.
Pendant ce temps, Luc au sommet lutte dans des rafales toujours plus fortes. L'onglet n'arrange rien aux manipulations de la voile. Alors qu'il me confie au téléphone son incertitude quant à la possibilité de décoller, une accalmie salvatrice semble se dessiner. Le suspense aura duré encore quelques minutes avant de voir la Spiruline surgir par dessus les crêtes dans un ciel bleu cobalt. Ouf tout s'est manifestement bien déroulé. Il me passe finalement par dessus la tête pour se poser directement dans la vallée.
Il ne reste plus qu'à rentrer, non sans passer chez notre vigneron favori, Bruno Carle, toujours à son affaire au milieu des vignes encore nues. Contrairement à ma www.bivouak.net/topos/course.php?id_course=5060&id_sortie=11501&id_sport=16, je me demande si cette activité volante est raisonnablement faite pour les futurs vieillards que nous sommes... Activité à double visage!