Cette année, la météo pour voler est un peu capricieuse, aussi, quand le bulletin annonce une trêve du ventilateur, il faut foncer vers les sommets et tant pis si la maigre réserve de RTT en prend un coup...
Le Mont Colombier d'Aillon, au coeur des Bauges est un objectif hautement recommandable, il trône au milieu du massif, imposant, pointé vers le ciel. Quel bonheur de randonner sur ces petits sentiers qui serpentent sous la ramure d'abord, à travers les immenses alpages ensuite. Après avoir fait le plein à la seule source du versant, il faut encore grimper la dernière partie aérienne. Sous le sommet, le vent du Sud se fait sentir, de plus en plus insistant, à tel point que j'en suis à me poser des questions.
Bref, arrivé à la cime, c'est un peu la déconvenue, le vent est bien présent et surtout mal orienté. Pourtant dans les derniers mètres, un petit repli dans le relief offre une opportunité de décollage. Seul hic à l'affaire, il est investi par un troupeau de chèvres... Si ces bestioles charmantes gambadent agréablement de rochers en rochers, les deux patous qui les encadrent sont en revanche beaucoup moins coopératifs.... Ils grognent sitôt que l'on s'approche du troupeau. Pourtant aucune autre alternative n'est possible. Je ne vais quand même pas redescendre à pied !
La préparation est minutieuse, sans geste brusque, sous l'œil torve des deux cerbères. C'est quand j'ai enfilé le baudrier que ça s'est corsé. Les deux patous s'en prennent subitement à mes suspentes, ils chopent les fils entre les canines et commencent à les ronger... Sans succès heureusement. Ils commencent alors à tirer la voile loin des biquettes, celles-ci, intriguées par le manège, viennent de plus en plus nombreuses autour de moi... c'est une vraie pagaille ! Un groupe de vieux randonneurs observe la manœuvre et jubile du spectacle. Jouer les Jerry Lewis, paix à son âme, ne m'enchante qu'à moitié... Heureusement l'un des participants, moins benêt que les autres, vient à mon aide. Courageusement il écarte sèchement les clebards de la voile malgré leurs menaces croissantes. J'en profite pour later deux ou trois chèvres trop gourmandes du tissu.
Il devient urgent de prendre le large, j'entends claquer les mâchoires sous mes pieds alors que la voile me tire vers le haut ! On dirait un film de James Bond, le plus vaillant des deux molosses va me suivre un moment. Il me faut pourtant remercier le valeureux randonneur qui a participé au décollage.... Un demi-tour me permet de revenir sur le sommet où les deux clébards courent encore en tous sens. Les biquettes en revanche semblent tout ignorer du tumulte que j'ai bien malgré moi suscité. Je passe près du groupe et félicite mon sauveur avant de retourner au thermique.
Cependant le cœur n'y est plus, surtout que la brise est quand même assez forte vers le sommet. La suite est beaucoup plus calme, l'atterrissage tranquille d'autant plus que j'avais demandé l'autorisation au paysan en arrivant. Mais qu'est-ce qu'on est bien en montagne !