Vol rando dans les Bauges
C'est une longue promenade que cette petite Sambuy, il y a longtemps que je ne l'avais faite. En me préparant au parking des touristes de l'abbaye de Tamié, il y a un gros 4X4 qui me dépasse en trombe et s'engage sur la route interdite de l'abbaye. Compte tenu du véhicule et de l’absence d’hésitation, il doit s'agir probablement d'un berger qui monte à l'alpage. Effectivement trois heures plus tard, alors que j'arrive à la bergerie de la Bouchasse je salue les trois personnes attablées face au panorama, l'une d'elle me renvoie mon salut en disant re-bonjour, c'est donc bien la même voiture qui est garée derrière le chalet.
En attendant, la montée jusqu'à la bergerie par le sentier piéton fut longue et surtout ponctuée d'une rencontre bien inamicale. Encore une fois, mon chemin a croisé un troupeau de biques sous la haute protection d'une paire de clébards féroces. Pourtant le troupeau avait ses quartiers bien en aval du chemin qui passe horizontalement largement au dessus. Néanmoins quelle que fut ma délicatesse à marcher silencieusement vers le sommet, les deux patous ont flairé ou entendu mes pas, et quand j'ai commencé la longue traversée au dessus des biquettes, j'ai bien vu les deux molosses entamer une cavalcade infernale dans ma direction à travers l’épaisse végétation.
J'ai eu beau courir sur ce sentier horizontal, les patous ont torché la montée aussi vite que je me suis précipité sur la sente pourtant roulante à cet endroit de la montagne. Nos trajectoires se sont confondues exactement au moment nous nous croisions. Les deux molosses sont là, devant moi, babines retroussées, crocs menaçants et poils dressés sur l'encolure, comme s'il était besoin à ces toutous d'ajouter à leur présence massive par une échine encore plus imposante. La conduite à tenir, me semble-t'il, est de ne pas les prendre en ennemis mais plutôt s'identifier comme le berger. D'un ton ferme, je leur intime l'ordre de rejoindre le troupeau, que le danger n'est pas ici mais ailleurs. Nous sommes face à face et les deux belligérants ne cèdent à aucune intimidation. Alors, pour faire évoluer les choses, j'avance d'un pas, ce qui a pour effet immédiat de les faire reculer de la même distance.
Après cette modeste victoire, il s'agit de persévérer, alors tranquillement je me remets à avancer, les deux patous cèdent du terrain et finissent par sortir du sentier et me contournent pour se retrouver derrière moi. Je sais combien mes mollets sont vulnérables une fois les molosses à l’arrière train... alors je fais volte face et intime une nouvelle fois l'ordre aux cerbères de retourner au troupeau. Encore une fois, ces chiens dressés à défendre les brebis n'en demeure pas moins, à l'origine, de braves bêtes (enfin je le suppute) alors, elles cèdent une nouvelles fois du terrain. J'ai finalement réussi à les semer en restant en marche arrière afin de rester face au danger. Les deux patous ont rapidement lâché l'affaire et ont brusquement bifurqué dans la pente pour rejoindre l'objet de leur garde.
Passé les granges de la Bouchasses, il ne reste plus qu'à rejoindre la dernière pente au dessus de la station de Seyttenex. Au sommet les conditions sont quasi parfaites, la voile se gonfle facilement avec la petite brise qui vient d'en bas, pile poil dans l'axe de la belle pente. J'ai perdu de l'altitude jusqu’à me retrouver au dessus de la Bouchasse. C'est ici que je me suis pris un coup de pied au cul, le thermique est puissant et large. J'enroule un peu mais la vue soudaine du lac d'Annecy au loin me refroidit, je file alors vers le col de Tamié. Le vent de vallée est déjà bien présent, cependant les champs sont vastes et fauchés. Il ne me reste plus qu'à rejoindre l'abbaye par un rapide sentier et acheter leur fameux fromage qui ressemble à un reblochon géant, une tuerie !